Fusions et acquisitions : quelle est la fréquence ?

1 282, c’est le nombre de milliards de dollars investis dans les fusions et acquisitions à l’échelle mondiale au premier semestre 2023. Ce chiffre, loin d’être anecdotique, donne le ton : le marché des F&A, souvent décrit comme cyclique voire imprévisible, obéit pourtant à des dynamiques qu’il serait hasardeux d’ignorer.

En 2023, le marché mondial des fusions et acquisitions a vu son volume d’opérations reculer de 17 % par rapport à l’année précédente, selon Refinitiv. Ce repli, loin d’être uniforme, cache des disparités : l’Asie-Pacifique maintient une étonnante stabilité et la technologie reste un terrain de chasse prisé pour les grands deals.

Le rythme de ces opérations fluctue au gré du contexte macroéconomique, de l’accès aux financements et des évolutions réglementaires internationales. Les cycles d’activité, tantôt effervescents, tantôt en sommeil, rappellent l’importance du bon timing et des choix stratégiques pour les entreprises.

Panorama des fusions et acquisitions : chiffres clés et évolution récente

Le marché des fusions et acquisitions (F&A) échappe à la simplicité des calendriers prévisibles. Entre 2015 et 2019, autour de 50 000 transactions étaient enregistrées chaque année dans le monde, avec une constance remarquable. Puis le choc du COVID-19 a bouleversé la donne : le nombre d’opérations chute de 12 %, la valeur totale s’effondre de 47 % en 2020. PwC et Deloitte ont livré ces constats, documents à l’appui. Pourtant, dès 2021, le marché repart à la hausse : +24 % en volume, +57 % en valeur. Un rebond qui n’a rien d’anodin.

Derrière ce retournement, l’influence des fonds de private equity se fait sentir. Près de 40 % des transactions leur sont attribuées cette année-là, stimulés par des taux bas et une abondance de capitaux. Les SPAC, ces véhicules d’investissement cotés, ont aussi attisé la concurrence, autant aux États-Unis qu’en Europe.

Les secteurs d’activité réagissent chacun à leur rythme. Technologie, santé, services financiers, industrie manufacturière, énergie et médias affichent une activité soutenue. InExtenso Finance, pour le marché français, confirme que la croissance externe reste une arme stratégique face à l’incertitude et aux mutations sectorielles.

Ces données sont un révélateur. Les cycles des F&A se lisent dans les chiffres, mais ils trahissent surtout la faculté d’un écosystème à se réinventer, encaisser les chocs, anticiper les transformations. La fréquence des opérations ne se mesure pas qu’en volume : elle incarne la vitalité et la capacité d’adaptation du tissu économique.

Pourquoi la fréquence des opérations varie-t-elle selon les secteurs et les périodes ?

Les fusions et acquisitions dessinent un territoire mouvant, jalonné de cycles, de pics d’activité et de pauses stratégiques. Leur fréquence répond à une combinaison précise de facteurs sectoriels, financiers et réglementaires.

Chaque secteur imprime sa cadence. La technologie multiplie les transactions pour rester à la pointe de l’innovation et faire face à un marché fragmenté. Santé et services financiers avancent, tirés par le besoin d’intégrer de nouvelles expertises, de sécuriser les chaînes de valeur ou de répondre à des obligations réglementaires. L’industrie lourde, quant à elle, privilégie des mouvements plus espacés, visant la consolidation ou l’optimisation d’échelle.

Voici les principales formes que prennent ces opérations :

  • F&A horizontales : conquérir des parts de marché, réduire la concurrence directe.
  • F&A verticales : renforcer l’intégration de la chaîne de valeur.
  • F&A conglomérales : diversifier les risques en étendant les activités.

La conjoncture donne le tempo. Les taux d’intérêt, ajustés par la Banque centrale européenne, influencent le coût de la dette et la capacité des acteurs à financer LBO ou rachats majeurs. Lors de périodes d’incertitude, à l’image de la crise sanitaire, le marché se contracte brutalement : 12 % de transactions en moins, 47 % de valeur partie en fumée en 2020. À l’inverse, excès de liquidité et pression concurrentielle relancent la machine, comme en témoigne l’envolée de 24 % des opérations en 2021.

La structure même des projets de fusion et acquisition varie selon qu’il s’agit d’une expansion géographique, de l’ajout de produits ou d’une stratégie concentrique. Mais une constante demeure : la fréquence des opérations reflète la capacité d’un secteur à se renouveler face aux défis qu’il rencontre.

Facteurs de succès et opportunités à saisir dans un marché en mutation

Le rythme des fusions et acquisitions s’accélère, mais garantir leur succès ne relève pas de la chance. Les études de PwC et Deloitte sont formelles : la création de valeur dépend avant tout des synergies réalisées, de la réussite de l’intégration post-fusion et d’une gestion rigoureuse des risques. Les exemples ne manquent pas. Lorsque Salesforce acquiert Slack, tout se joue sur l’intégration des technologies, la complémentarité des offres, la rapidité d’adoption par la clientèle. Même logique pour SAP et Signavio : capter l’innovation, accélérer la transition numérique.

Les synergies financières et opérationnelles constituent la pierre angulaire de toute opération réussie. Le mode de règlement, qu’il s’agisse d’actions ou de liquidités, influence la perception du marché et la structure de l’entité issue du rapprochement. Les analyses sectorielles montrent que les opérations payées en actions exposent moins l’acquéreur, surtout lorsque la cible est cotée. Le statut de l’entreprise cible joue aussi sur la vitesse d’exécution, la transparence et la valorisation finale.

Trois leviers ressortent pour maximiser les bénéfices de ces opérations :

  • Recherche de synergies de coûts : rationalisation, mutualisation des fonctions supports, optimisation des achats.
  • Accès à de nouveaux marchés ou technologies différenciantes : acquisition de compétences, élargissement du portefeuille d’actifs.
  • Gestion fine des risques d’intégration : alignement des cultures, gouvernance adaptée, anticipation des résistances internes.

Les fonds de private equity concentrent près de 40 % des transactions en 2021, profitant des fluctuations de valorisation et d’une fragmentation sectorielle accrue. L’innovation s’impose désormais comme levier incontournable, en particulier dans la tech et la santé, où la complémentarité technologique ou l’accès à de nouveaux marchés font la différence.

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Enjeux réglementaires : comprendre l’impact des normes sur la dynamique des M&A

Les fusions et acquisitions ne se jouent pas uniquement sur le front financier. La réglementation impose ses règles, structure la fréquence des transactions et redessine les stratégies des entreprises. Les autorités de la concurrence, particulièrement actives en Europe, scrutent chaque mouvement d’envergure, évaluent les risques de domination, interviennent pour remodeler voire bloquer certaines opérations. Le contrôle se fait plus serré, touchant autant les secteurs traditionnels que la tech, les médias ou la santé.

La compliance ne se limite plus à l’antitrust. Les critères ESG (environnement, social, gouvernance) s’inscrivent désormais dans le cahier des charges : chaque opération exige la prise en compte des normes extra-financières, au risque de ralentir, voire d’annuler, la transaction. Les fonds de private equity, très présents sur ce marché, intègrent ces enjeux dès la phase de due diligence. Les métiers du conseil se professionnalisent : la CNCEF France M&A et l’Université Dauphine-PSL multiplient certifications et programmes de formation dédiés.

Voici comment cette régulation influence concrètement les opérations :

  • Contrôle renforcé des autorités de la concurrence : analyse préalable, injonctions, remèdes comportementaux ou structurels.
  • Intégration systématique des critères ESG dans la documentation transactionnelle.
  • Montée en compétences des professionnels : formation, conformité, anticipation des risques réglementaires.

La régulation ne bride pas l’élan des fusions-acquisitions. Elle façonne le jeu, stimule l’innovation juridique, aiguise la préparation des dossiers et impose une nouvelle discipline. Sur le marché français comme à l’échelle européenne, elle redistribue les cartes et ouvre la voie à de nouvelles stratégies, preuve que dans l’univers des F&A, seule l’adaptation permet de garder une longueur d’avance.

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